Le mythe du GR20
Le GR20 a la réputation d’être le parcours de randonnée le plus difficile d’Europe. Un véritable mythe nietzschéen ! Il permettrait, en effet, aux anonymes du sac-à-dos, d’accéder enfin au stade de surhomme… Une bonne blague d’après les vieux montagnards qui rigolent en finissant leur verre de myrte. 16 jours pour parcourir 175 kilomètres et 12 000 mètres de dénivelée, cela n’a rien d’un exploit ! Une promenade de santé, même, comparée à d’autres raids alpins ! Qu’importe ! La légende du GR20 est bien vivante et ses refuges ne désemplissent pas…
Mais, plutôt que « faire le GR20 », ne ferions nous pas mieux de le vivre, quitte parfois à nous égarer sur un sentier de traverse ?
A peine avoir quitté la côte, nous voilà projetés dans un monde fabuleux où des tunnels ont été percés dans les bruyères et arbousiers géants. Un peu plus haut, on perçoit le chant un peu rauque de la petite sitelle corse. Une forêt de pins laricio lance ses pointes vers le ciel comme une batterie de missiles. Attention à l’explosion des couleurs ! Elles sont sans nuances, sorties du tube, comme un tableau fauviste : amarante des rhyolites du Cinto, bleu de Prusse des lacs de montagne, blanc fulgurant des névés. A peine avons nous quitté la mer que nous voilà en haute montagne. « M… j’ai oublié les crampons ! ». On se résout à taper du pied pour bien s’ancrer dans la neige, en appui sur les bâtons. An loin se profile déjà la promesse de la mer Tyrrhénienne. Plus bas, le chemin de transhumance redevient visible et file vers un immense plateau où paissent des chevaux… Un ancien prend l’ombre contre le mur d’une bergerie d’où s’échappe un antique parfum de brocciu et de soupe aux herbes.