Le Mont Aiguille
Pff… Deux heures après avoir quitté la Richardière, nous voilà enfin au pied de la voie matérialisée par une grosse et ancienne — elle date de 1878 — broche en fer forgé. Après nous être encordés, nous nous avançons sur la rampe… qu’a empruntée Antoine de Ville, capitaine de l’armée du roi Charles VIII, et ses compagnons, le 26 juin 1492, trois mois avant que Christophe Colomb ne « découvre » un nouveau continent. Pas étonnant que le rocher soit un peu patiné !
« L’Amérique, je veux l’avoir et je l’aurai… ». Nous fredonnons pour nous donner du courage avant de traverser accroupis, le Passage des Meules. Malgré le câble et la corde, nous n’en menons pas large. Et ce foutu sac à dos qui accroche le plafond ! Un câble ? Pourquoi s’en offusquer, la première ascension a nécessité moult cordes, grappins et échelles. Antoine de Ville, s’est même fait accompagner par un « escalleur du roi », spécialisé dans l’assaut des forteresses, ainsi que d’un tailleur de pierre. Pour creuser une galerie ? Le temps de « l’escalade propre » ne viendra que bien plus tard…
L’accès au dernier couloir est un peu « à bras »… Mais l’accès au Paradis et à ses belles lavandières qui font sécher le linge de Dieu — sans doute les restes des névés que l’on apercevait depuis le Grand Veymont —mérite quelques efforts, sinon de la repentance. Enfin, la grande prairie, comme la piste d’un porte-avion… semé d’orchidées et de lys blancs, la fleur du roi ! Nous cherchons en vain, les descendants des lapins que la petite troupe a mené là haut pour coloniser ce nouveau continent ! Le Mont Inaccessible, ne l’est plus… Une nouvelle fois, le Paradis est repoussé à d’autres confins… Bien avant qu’on ne réalise qu’il n’est pas là-haut dans le ciel, mais en nous et auprès de nous…